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Au centre de la Voie lactée, il y a un trou noir supermassif. Sagittarius A* (Sgr A*), c'est son petit nom. Mais en est-on bien sûr ? Personne n'est jamais allé le voir de près, après tout. Les astronomes ont déduit sa présence des effets gravitationnels qu'il exerce sur les objets qui peuplent notre galaxie. Sur les étoiles dites S, notamment, des étoiles proches de lui. Et aujourd'hui, des chercheurs du Centre international d’astrophysique relativiste (Italie) suggèrent que ces effets pourraient aussi bien -- voire mieux -- être expliqués par la présence non pas d'un trou noir, mais d'une masse de matière noire.

C'est le comportement étrange d'un objet appelé G2 -- dont les astrophysiciens ignorent encore la nature exacte -- alors qu'il passait à proximité de Sagittarius A* qui a éveillé leurs soupçons. G2 est en effet miraculeusement sorti indemne de sa rencontre avec le supposé trou noir supermassif au centre de la Voie lactée.

Sur cette vue de la Voie lactée, la position de notre Soleil et le centre de la Galaxie dans lequel se trouve Sagittarius A*, un trou noir supermassif… ou un amas de matière noire. 
Sur cette vue d’artiste de la Voie lactée, la position de notre Soleil et le centre de la Galaxie dans lequel se trouve Sagittarius A*, un trou noir supermassif… ou un amas de matière noire. voie lactee trou noir

Des comportements cohérents avec la présence de matière noire
L'observation pourrait être expliquée par le fait que G2 ne soit pas qu'un simple nuage de gaz. Sa structure aurait en effet pu être maintenue intacte par la présence cachée en son sein d'une ou deux étoiles. Mais les chercheurs du Centre international d'astrophysique relativiste, eux, l'expliquent d'une tout autre façon. Sgr A* serait constitué d'une concentration de matière noire de quelque 500.000 masses solaires. Des particules exotiques que les physiciens appellent des « darkinos ». Maintenus en équilibre par leur attraction gravitationnelle propre. Ils formeraient ainsi une boule aux contours flous dont l'attraction gravitationnelle n'aurait pas été assez forte pour détruire G2.

Et ce qui donne de la consistance à cette théorie, c'est qu'elle permet aussi de reproduire les comportements des 17 étoiles dites S les mieux décrites par les astronomes. Enfin, lorsque les chercheurs donnent aux darkinos la bonne masse -- un neuvième environ de celle d'un électron -- et la bonne vitesse. Alors, pour confirmer cette nouvelle hypothèse, il faudra tout de même attendre que leur modèle reproduise également d'autres observations faites à travers l'Univers. Comme expliquer pourquoi les galaxies tournent plus vite qu'elle ne devraient par rapport à la masse qu'on leur connait.

Ce trou noir supermassif quatre millions de fois plus massif que le Soleil. Entouré d’un disque incandescent de matière en mouvement, ce puits sans fond d’espace-temps est habituellement masqué par un voile de gaz, de poussière et d’étoiles en orbite.

Mais les scientifiques, qui utilisent un réseau mondial de télescopes connu sous le nom d’Event Horizon Telescope (EHT), ont enfin pu jeter un coup d’œil au cœur de la galaxie, et ont dévoilé hier la toute première image de la silhouette de ce trou noir. Les observations, réalisées en 2017, ont été décrites dans une série d’articles scientifiques publiés récemment dans la revue Astrophysical Journal Letters.

« Aujourd’hui, le Event Horizon Telescope est ravi de partager avec vous la première image directe du doux géant situé au centre de notre galaxie : Sagittaire A* », a déclaré Feryal Özel, de l’université de l’Arizona, lors d’un point presse organisé pour annoncer cette réalisation. « Je l’ai rencontré il y a vingt ans et, depuis, je l’aime et j’essaie de le comprendre. Mais jusqu’à présent, nous ne disposions pas de l’image directe pouvant confirmer que Sagittaire A* était bel et bien un trou noir. »

Capture décran 2022 07 29 à 11.29.02

L’image montre un anneau asymétrique de matière rayonnante entourant une fosse d’obscurité : l’ombre du trou noir connu sous le nom de Sagittaire A*. La photographie s’approche de l’horizon du trou noir, le point de non-retour au-delà duquel les étoiles, les planètes, la poussière et même la lumière sont perdues à jamais.

« La lumière qui est trop proche du trou noir, assez proche pour être avalée par lui, finit par traverser son horizon et ne laisse derrière elle qu’un vide sombre en son centre », a expliqué Özel.

Cette dernière image d’Event Horizon Telescope est le fruit d’une collaboration mondiale de plus de 200 scientifiques. En 2019, cette dernière avait dévoilé une image d’apparence similaire d’un immense trou noir au centre de M87, une galaxie située à 50 millions d’années-lumière. La photographie marquait la première fois que l’ombre d’un trou noir avait été directement observée. Les deux images ont été réalisées en combinant les données de huit observatoires du monde entier, transformant ainsi la Terre en un immense télescope.